La Fabrique Culturelle

Claude Lafortune: l’imaginaire en papier

Il n’y a qu’un Claude Lafortune. Cette façon qu’il a de raconter des histoires avec le papier, personne ne l’avait avant lui, et personne n’a pu lui succéder. À plus de 80 ans, alors qu’il a déjà marqué à jamais le Québec avec L’Évangile en papier (et tant d’autres choses!), il crée toujours avec l’enthousiasme d’un enfant. Rencontre avec un grand monsieur.

« J’ai inventé mon métier»

Rencontrer Claude Lafortune, c’est renouer avec son enfance. En plus de L’Évangile en papier, il a participé à la création des décors de La souris verte, de Sol et Gobelet et de  La Ribouldingue. Rien de moins! Il a également conçu des spectacles autour de Noël, de Don Quichotte et du Petit Prince, en plus de signer des décors pour le théâtre et le cinéma (IXE-13, c’est lui!). On lui doit aussi de nombreux albums jeunesse illustrés, nés notamment d’une collaboration historique avec Henriette Major. Tout ça avec ce talent inusité et jamais vu qui consiste à raconter des histoires avec du papier. 

Et dire que tout a débuté par un congédiement : «  C’est une façon polie de te dire que t’as pas de talent »! 

 

Mais comment fait-il?

Au temps de L’Évangile en papier, les personnages de Claude Lafortune se devaient d’être simples et malléables afin de respecter le rythme rapide d’une production télévisuelle. Libérées de cette contrainte, ses créations n’ont cessé de gagner en volume et en finesse, devenant de véritables sculptures. Par moments, on peine à croire qu’il s’agit de papier tellement l’artiste maîtrise le matériau. Prenant Molière comme cobaye, Lafortune révèle une partie de ses secrets.  

L’exposition L’arche de Noé selon Claude Lafortune

C’est Jean-François Royal, directeur du Musée des religions du monde, à Nicolet, qui a eu la belle idée de cette exposition. Sachant que M. Lafortune travaillait à une série d’oiseaux de papier, il a suggéré à l’artiste d’élargir sa production en s’inspirant d’une des plus belles fables du monde: l’arche de Noé. C’est ainsi que les fou de Bassan, geai bleu, aras et macareux ont vu arriver ours, girafe, cerf, chimpanzé, iguane, lion…  

Colle, papier, ciseaux

L’année 2011 a marqué un point tournant pour Claude Lafortune, qui s’était fait discret depuis sa retraite télévisuelle, en 2000. Première collaboration avec le Musée des religions du monde, l’exposition Colle, papier, ciseaux proposait alors 25 sculptures époustouflantes de personnages historiques et permettait au public de renouer avec un artiste au sommet de son art. Pas étonnant que l’exposition continue d’être présentée encore aujourd’hui. 

Crédits photo :  Alain Coulombe / Musée des religions du monde

Le papier est éphémère

Deux choses frappent lorsqu’on rencontre Claude Lafortune : l’incroyable diversité de sa création ainsi que sa modestie. Dans son atelier, partout, on voit des sculptures de papier, dont LE Jésus ayant servi à L’Évangile en papier. Sous le Plexiglas, on perçoit le passage du temps, et la triste évidence saute alors aux yeux : le papier est éphémère. Dès lors, les œuvres de Claude Lafortune sont condamnées à disparaître. 

Le principal intéressé ne s’en formalise pas, pas plus qu’il ne cultive la nostalgie ou qu’il s’enorgueillit des nombreuses distinctions reçues. Il crée depuis toujours avec une seule motivation, presque enfantine: «Faire plaisir ». Néanmoins, en fouillant dans ses archives personnelles (merci, M. Lafortune!), on fait des découvertes épatantes… 

Le Noël de Claude Lafortune

Le succès phénoménal de L’Évangile en papier a eu pour effet d’associer Claude Lafortune à la religion durant toute sa carrière, lui qui aurait pu (et voulu) faire autre chose. À l’occasion de Noël, ce sont des vœux universels d’espoir et de sérénité qu’il nous a offerts alors qu’un ange prenait vie entre ses mains.