La Fabrique Culturelle

Amarrer, amariner, échouer…

Parler une langue dans laquelle on entend la mer.

La Madelinienne Suzanne Richard s’est donné comme humble mission d’être une gardienne des mots; ces mots du monde de la pêche et de la mer qu’on ne veut pas oublier.

Pendant l’écriture de son recueil de nouvelles La mer, trois kilomètres à gauche, deux ouvrages l’ont captivée: le Dictionnaire des mots nés de la mer, de Pol Corvez, et le Dictionnaire des régionalismes des Îles-de-la-Madeleine, de Chantal Naud. Depuis, elle multiplie les rencontres sous forme de causeries et d’ateliers dans le cadre du programme La culture à l’école et auprès du public; des moments au cours desquels elle transmet sa passion pour les mots, et particulièrement ceux qui viennent de la mer.

Amarrer: Amarrer, c’est attacher les bateaux. Aux Îles-de-la-Madeleine, situées en plein cœur du golfe du Saint-Laurent, on amarre plus que les bateaux. On remarque dans le langage des gens de chez nous qu’on utilise des mots empruntés à la navigation pour s’exprimer au quotidien. C’est le cas pour «amarrer». On amarre sa tuque et son manteau les jours de grands vents. On amarre le chien pour l’empêcher d’aller fouiner chez la voisine. On amarre un paquet pour qu’il se rende, avec sa lettre, en bon état à destination. Puis on amarre aussi ses souliers pour aller porter le paquet en question à la poste. Un lacet de soulier, c’est aussi une petite amarre qui, une fois attachée, peut vous mener loin, loin.

Échouer: Toucher le fond, en parlant d’un bateau. Cela peut vouloir dire aussi faire naufrage. Sur terre, on échoue de différentes façons. Aux Îles, on dira qu'on va échouer ici pour exprimer qu'on va passer un moment à cet endroit, sans bouger. On va s'installer pour la soirée ou pour la nuit.

Les dunes et les eaux des Îles-de-la-Madeleine en auraient long à raconter sur les naufrages. Deuxième cimetière marin en importance en Amérique du Nord (juste après l’île de Sable), les Îles ont même une carte des naufrages, sur laquelle on en dénombre plus de 500. Avec l’apparition des phares, toutefois, le nombre de naufrages a énormément diminué pour être inexistant aujourd’hui. Mais les lieux ont gardé des traces de leur mémoire: ici et là, une plage ou un canton porte le nom de l’Échouerie.

(Source: Suzanne Richard)

http://www.facebook.com/suzannerichardauteure

Crédits

Télé-Québec Gaspésie–Îles-de-la-Madeleine:

Coordination: Caroline Bujold

Réalisation: Estelle Marcoux

Caméra et montage: Julien Leblanc

Technicienne en production: Janie Poirier

Crédits œuvres: Suzanne Richard (texte)

Remerciements: Achille Chiasson, Arrimage, Corporation culturelle des Îles-de-la-Madeleine