La Fabrique Culturelle

Lectures #LaFab: trois premiers romans

Publier un premier roman n’est pas une mince affaire. Pour certains, il s’agit du premier pas de leur carrière littéraire. Pour d’autres, il s’agit d’un détour de leur style habituel. En tant que lecteur, on découvre alors un univers, une plume, pour la toute première fois, et ça passe ou ça casse. En collaboration avec la Maison de la littérature de Québec, on vous propose ici trois premiers romans marquants, qui donnent envie de s’accrocher à leurs autrices et auteurs.

Suggestions de la Maison de la littérature


Ce qu’on respire sur Tatouine, de Jean-Christophe Réhel

Del Busso

C’est un livre d’une grande sensibilité, qui nous guide vers des moments d’intensité nous tirant les larmes et qui est animé d’une profonde mélancolie comme d’un humour fin. L’écriture est empreinte d’une simplicité d’où émane constamment des touches poétiques, ce qui la rend à la fois riche et accessible. On s’attache au narrateur, sorte d’antihéros en quête de lui-même, complètement embourbé dans une vie qui pourrait être considérée comme ratée, mais dans laquelle son imagination, sa vulnérabilité et sa sensibilité nous font accéder à une beauté très pure. — Jean-Philippe Marcoux-Fortier

Feue, d’Ariane Lessard

La Mèche

Dans ce premier roman coup de poing, Ariane Lessard nous transporte dans l’un ces villages où tout se sait, mais rien ne se dit. Sa plume puissante donne voix à de multiples personnages, tous plus dysfonctionnels les uns que les autres. L’espace est laissé aux femmes et aux filles, témoignant de leur colère sourde et de leurs imaginaires grandioses. Le rythme y est déroutant, envoûtant, fascinant. Ne passez pas à côté! — Virginie DeChamplain

Suggestion de #LaFab


La trajectoire des confettis, de Marie-Ève Thuot

Les Herbes rouges

Ambitieux et colossal, ce premier roman de l’autrice montréalaise Marie-Ève Thuot est assez impressionnant et nous fait même douter du fait qu’il s’agit d’un premier ouvrage tellement il est solidement ficelé. Conçu sur le principe du roman choral — c’est-à-dire une histoire qui est présentée selon le point de vue de différents personnages à la fois, et dont les existences s’entrecroisent —, La trajectoire des confettis invite également à un voyage entre plusieurs époques. On y suit plus d’une dizaine de personnages venant d’une même famille à la fois éclatée, raboutée et étendue par différents événements (infidélité; couple entre tante et neveu; homme devenu père à des multiples reprises; etc.), à travers laquelle on revisitera la notion de couple dit «traditionnel» avec, au passage, celle de la sexualité.

La jeune autrice, qui fait actuellement un doctorat sur les imaginaires de la fin du monde, offre ici — on l’a dit — une toute première incursion dans l’univers de la littérature québécoise, mais c’est une œuvre parfaitement maîtrisée et complexe qui surprend par sa maturité. C’est sans grande surprise qu’on a vu cet ouvrage paraître aux éditions Les Herbes rouges, qui publient également le génial Jean-Simon Desrochers, lui-même auteur d’une imposante saga l’ayant révélée au public, soit La canicule des pauvres (2009). On trouve dans ces deux univers cette impression de monde post-apocalyptique, mais tandis que Desrochers nous dépeint un monde sombre et désabusé, Thuot nous livre une fresque relativement optimiste, où le couple se réinvente et où la sexualité se vit librement.

Résolument féministe, ce roman au titre magnifique reprend l’idée de «l’effet papillon» — le principe voulant qu’un seul petit événement en apparence sans importance puisse enclencher une suite d’événements qui va tout transformer —, avec deux confettis qui changeront le cours de l’histoire. Du moins, l’histoire de cette famille singulière… Le personnage de Raphaëlle est, et de loin, le plus fascinant, avec ses nombreuses références à l’histoire et à la mythologie, mais l’ensemble est captivant et mériterait même une seconde relecture tellement tout est foisonnant et riche. À découvrir absolument.