La Fabrique Culturelle

Lectures #LaFab: cinq livres qui plongent au cœur des sentiments humains

Amitié, santé mentale, sexualité, mortalité: voilà des sujets pas toujours faciles à aborder, mais qui méritent notre attention. Que ce soit par l’humour, la fiction ou l’illustration, ces cinq titres les abordent de front, avec intelligence et sensibilité.

Les suggestions de la Maison de la littérature de Québec


La route du Pays-Brûlé, de Jonathan Livernois

Atelier 10

«La route du Pays-Brûlé aborde la question bien délicate des rapports que nous entretenons avec nos racines. Affligé d’un cancer au début de son adolescence, l’auteur nous parle du confort qu’il trouvait dans un passé lui paraissant alors plus sécuritaire que l’avenir, où la mort pouvait l’attendre. En parallèle, le récit aborde la nécessité de recréer un patriotisme aux horizons plus ouverts et dénués des réflexes identitaires qui repoussent. À coup sûr l’un des meilleurs documents de cette collection, aux côtés des essais de Samuel Archibald et de Véronique Côté.» — Bobby Aubé

Imago, de Nathalie Jean

Leméac

«Nathalie Jean maîtrise l’art des images surprenantes, des situations à la fois banales et incongrues, des portraits ciselés et des émotions nuancées. Elle nous tisse ici un beau conte, une histoire à la frontière du rêve et de la réalité, avec des personnages aussi contemporains qu’intemporels.

Une magie de lecture, lumineuse comme un matin d’hiver, réconfortante comme une couverture de laine multicolore.» — Isabelle Moisan

Les suggestions de #LaFab


J’ai mal et pourtant, ça ne se voit pas…, de Lucile de Pesloüan et Geneviève Darling

Éditions de l’Isatis

On ne compte plus le nombre de fois où on a entendu dire que la dépression était le mal du siècle. Malgré tout, la santé mentale demeure un sujet peu discuté, comme caché derrière une épaisse couche de fard social qui donnerait bonne mine à tout le monde. Mais parfois — voire souvent —, le masque craque, et il faut pouvoir en parler. C’est ce que font Lucile de Pesloüan et Geneviève Darling dans cet album illustré qui s’adresse aux ados. À chaque page, un personnage inventé, mais inspiré de vrais témoignages, exprime son mal-être dans des phrases aussi simples qu’elles sont criantes de vérité. Un moyen efficace d’entamer la discussion avec ses ados sur des problèmes (stress, anxiété, dépression) qui apparaissent de plus en plus tôt dans la vie…

La zone de l’amitié: guide des rapports non sexuels et harmonieux entre hétéros de bonne volonté, de Val-Bleu

Éditions du remue-ménage

Voilà une petite BD fort rigolote qui veut déconstruire le mythe voulant que les relations d’amitié hétérosexuelles entre hommes et femmes soient impossibles parce que le désir, l’attirance et/ou l’amour viennent inévitablement s’en mêler. On a tout faux, selon l’auteure Val-Bleu, qui trouve que l’amitié est l’un des plus grands cadeaux que l’on peut offrir à l’autre. Selon elle, les phrases du genre « Il/Elle veut « juste » rester ami.e.» dévalorisent l’amitié, laquelle demeure pourtant un très grand don de soi. Avec ses illustrations sympathiques et un ton très familier (ça jure et c’est très drôle, mais c’est surtout approprié!), elle nous fait entrer dans une soirée entre amis et amies où un débat s’installe autour du thème en question. On aborde donc plusieurs points de vue et on déconstruit certains stéréotypes (par exemple: projeter, malgré leur tout jeune âge, une éventuelle relation amoureuse sur des enfants de sexe opposé qui se côtoient et jouent ensemble) pour démontrer que, oui, l’amitié entre un homme et une femme est tout à fait possible. À découvrir!

Une affection rare, de Catherine Lemieux

Triptyque

Roman dense, chargé, mais porté par un souffle incroyable. Et l’expression ne peut pas mieux s’appliquer à ce livre, qui raconte l’histoire d’Anna, atteinte d’une affection rare aux poumons. Or, l’affection est double, car il s’agit aussi du récit d’une amitié étrange — vacillant continuellement entre passion et haine, symbiose et détachement — entre Anna et Sarah. Ce roman, qui nous enferme dans une sorte de huis clos suffocant entre les deux jeunes femmes, nous fait également pénétrer dans la tranquille (mais non moins certaine) noyade intérieure d’Anna, dont les poumons se couvrent peu à peu d’algues; un état dû à une étrange maladie qui l’attaque. Le livre se scinde en deux types de narration, soit le récit de l’amitié des deux personnages et les réflexions d’Anna. Celles-ci, présentées sous forme de petits poèmes, apparaissent comme des moments de prise de conscience (lorsque le personnage va faire de la natation, entre autres) qui semblent flotter entre réalité et rêve éveillé et qui se présentent comme de l’écriture automatique, sans ponctuation, lancées dans un seul souffle. Oui, le souffle encore, car on revient toujours à cette respiration, souvent haletante, souvent saccadée — comme comprimée entre cet étouffement dans une ville et une vie détestées, sans oublier une amitié asphyxiante… Voilà un livre fascinant, qui dévoile une écrivaine de grand talent.