La Fabrique Culturelle

Littérature queer: s’ouvrir à la diversité

Les suggestions littéraires de la Maison de la littérature

La littérature queer représente un espace vibrant et puissant où les auteurs et autrices LGBTQ+ offrent aux gens une vision du monde inspirante. Comme la diversité des voix et des expériences est primordiale pour décloisonner la pensée, voici quelques suggestions littéraires qui proposent une exploration riche de l’identité.

Suggestions de la Maison de la littérature
Par Alix Paré-Vallerand, poète et employée de la Maison de la littérature

Les trouées, de Chantal Nadeau
(Hamac)

Attention: ce recueil emprunte une forme non linéaire, telle la mémoire traumatique. «Welcome to my ptsd darling», écrit Chantal Nadeau dans le poème qui ouvre Les trouées, paru aux éditions Hamac. Ces mots teintés d’humour noir annoncent la suite; seront abordées, sous forme de retours en arrière, la tuerie de Polytechnique et les violences par armes à feu aux États-Unis, entre autres sujets. L’autrice, qui enseigne les études féministes à Chicago, livre un fantastique recueil queer à la forme inventive. Attelez-vous.

L’amour des oiseaux moches, de Symon Henry (Omri)

Maisie-Nour Symon Henry dessine le son. L’amour des oiseaux moches sera lu en imaginant des bruits émerger des différentes partitions graphiques qui parsèment le recueil. L’auteur·ice, qui vient d’une famille d’origine copte égyptienne, aborde ses origines: «nous nous entassons dans les valises à tapis mythiques / de nos parent·es migrateur·ices». On sort vulnérable de cette œuvre pluridisciplinaire unique.

Se faire éclaté·e: expériences marginales et écriture de soi, de Nicholas Dawson, Pierre-Luc Landry et Karianne Trudeau Beaunoyer
(Nota Bene)

Dans cet ouvrage collectif, 10 auteurs et autrices explorent les enjeux de l’écriture autobiographique. Comment se raconter, rassembler des morceaux de soi, en faire le montage pour façonner un texte? «Je ne peux plus écrire autrement que par fragments: je suis épuisé», révèle Pierre-Luc Landry à la page 88. Dans ce recueil, l’écriture de soi passe par l’informe, le queer; cet informe est politique.

Corps vivante, de Julie Delporte
(Pow Pow)

À la mi-trentaine, la bédéiste Julie Delporte s’est découverte lesbienne. Se peut-il que toutes ces années, elle ait été contrainte à l’hétérosexualité par défaut? S’en est suivie une période d’exploration de cette identité saphique: un changement de style, une nouvelle coupe de cheveux… Dans cet album délicat, la bédéiste Julie Delporte se questionne également sur le corps qui a vécu des agressions. Pourquoi veut-on autant le réparer? «Qu’on l’aime. Qu’on en prenne soin comme il est: parasité. Affecté.»

Parfois mon cœur reste accroché au trapèze, de Geneviève Dufour
(Bayard Canada)

Elle, c’est Salem. Juste Salem (comme la ville des sorcières). Salem n’aime pas les robes. Salem se sent un peu bum (surtout quand elle lance des œufs aux policiers). Salem écrit des poèmes d’amour dédiés à sa meilleure amie, Vic: «paysage éblouissant tu es / la cause directe / des sorties d’autoroutes manquées». Parfois mon cœur reste accroché au trapèze, c’est aussi la quête de quatre ados de 15 ans qui mènent un combat pour sauver leur école de cirque du pic des démolisseurs.

La Fabrique culturelle suggère…

Les carnets de l’underground, de Gabriel Cholette
(Triptyque)

À travers le récit de nuits exaltées par l’alcool et les drogues, Gabriel Cholette donne accès aux gens à ce qui se passe lorsque les tabous tombent. Dans une langue orale décomplexée, ce recueil composé en fragments se présente comme un lieu d’apprentissage où le rythme pulse aussi fort que la musique techno. Les carnets en question, d’abord publiés sur Instagram, sont accompagnés des illustrations de Jacob Pyne, qui créent un dialogue fort avec le texte.

Télévision queer, sous la direction de Joëlle Rouleau
(Remue-ménage)

L’ouvrage, un collectif publié sous la direction de Joëlle Rouleau, réunit des essais de 10 collaborateurs et collaboratrices qui brossent un portrait actuel de l’offre télévisuelle dans différents contextes culturels. Si certains textes s’attardent à la réalité télévisuelle américaine, d’autres s’intéressent plutôt à ce qui se trame au Québec et au Canada. Le queer à la télé est exploré et remis en question, tout en prenant en compte les limites et les possibilités de ce média. Un livre étonnant!

11 brefs essais queers, sous la direction de Marie-Ève Kinglsey
(Somme toute)

Chacun des textes de ce collectif, dirigé par Marie-Ève Kingsley, raconte une facette du prisme de l’identité queer. Les auteurs et autrices avaient à cœur de décloisonner leurs expériences personnelles pour célébrer la diversité et offrir une expérience de lecture tout aussi évocatrice. La forme des récits reflète aussi cette volonté: déconstruire la forme pour libérer une parole depuis trop longtemps soumise.

Je m’endors au creux d’un meurtre, de Sébastien Émond
(Hashtag)

Avec ce troisième recueil de poésie, Sébastien Émond utilise les codes de l’horreur et déstructure le langage pour contester l’ordre établi hétéropatriarcal. Ces poèmes, vifs et déstabilisants, se lisent dans le souffle haletant d’une tragédie et ouvrent un dialogue nécessaire.

Pas besoin d’ennemis, de Julien Guy-Béland
(Héliotrope)

Dans ce roman autobiographique, Julien-Guy Béland aborde de manière frontale la dépendance et la consommation, et il remet en question la masculinité sous toutes ses facettes. Son écriture s’avère magnétique et dépouillée; elle devient même obsédante par moments. Le rythme discontinu du récit se colle à la réalité des soirées où le narrateur s’enivre, ce qui crée une forme puissante.